Les opérateurs du secteur du bâtiment ont été rassurés le 18 février 2021, par les propos de la Ministre du Logement lors d’une conférence de presse, puisque celle-ci a annoncé l’entrée en vigueur de la nouvelle réglementation environnementale des bâtiments neufs dite RE2020 à une date ultérieure à celle prévue initialement ainsi que de multiples « assouplissements » pour suivre la position du Conseil supérieur de la construction et de l’efficacité énergétique (CSCEE). Attendue pour le 1er Janvier 2022, cette future règlementation environnementale nous amène à nous interroger sur les enjeux auxquels seront confrontés les professionnels du secteur concernant la performance énergétique des immeubles à construire.
Le législateur a adopté la loi du 8 novembre 2019 (Loi 2019-1147 du 8-11-2019 : JO 9 texte n°1) pour répondre aux impératifs écologiques et climatiques. Cette loi relative à l’énergie et au climat a inscrit l’objectif de parvenir à la neutralité carbone avant 2050, définissant cette neutralité comme « un équilibre, sur le territoire national, entre les émissions anthropiques par les sources et les absorptions anthropiques par les puits de gaz à effet de serre ».
Le secteur de la construction constitue, à lui seul, 45% de la consommation d’énergie et 25% des émissions de gaz à effet de serre, d’où l’importance d’apporter des dispositions contribuant à la protection de l’environnement.
Ainsi a été créé le concept de performance énergétique des bâtiments, faisant référence à la quantité d’énergie consommée par un bâtiment au cours d’une année. Cette notion est construite autour de trois finalités, que sont la réduction des émissions et de consommation de gaz à effet de serre, la promotion de techniques plus performantes du point de vue de l’environnement pour la construction, et la diminution des coûts énergétiques, avec un impact raisonné sur l’utilisateur.
Pour que le bâtiment devienne un facteur favorable à l’environnement, aux yeux des utilisateurs et des constructeurs, notre nouvelle règlementation environnementale ajoute à la dimension « thermique » de notion de performance énergétique, une dimension « environnementale ».
La pratique notariale a constaté de nombreux développements des normes et des labels liées aux performances énergétiques et environnementales.
Ainsi, les normes touchant à la protection de l’environnement se sont multipliées, la RE2020 est un exemple récent, objet de notre réflexion du jour, et la suite de nombreuses lois, comme les deux règlementations thermiques de 2005 et de 2012.
D’un point de vue contractuel, les investisseurs ont montré leur détermination à appliquer des contraintes plus élevées en termes de performance énergétique aux opérateurs. On peut noter, comme exemple, la création de labels tels que BBC, Habitat ou NF, et de « challenge » tel que la RT2012 -10%.
Les constructions neuves ne seront soumises à ces dispositions qu’à partir du 1er janvier 2022, date de son entrée en vigueur. Plus précisément, ces constructions seront subordonnées à la RE2020 si l’usage du bâtiment entre dans le cadre de l’article 111-20-6 du Code de la Construction et de l’Habitation et si la demande de permis de construire ou le dépôt de la déclaration préalable intervient postérieurement au 1er janvier 2022. Les constructions ne faisant pas partie du secteur tertiaire ou commercial entreront dans le champ de cette règlementation à une date restant encore inconnue, mais l’appliqueront certainement par anticipation.
Il est d’ailleurs à craindre une augmentation du nombre de dépôt de permis de construire juste avant le 1er Janvier 2022, dans le but de ne pas subir les surcoûts de la mise en œuvre de la RE2020.
Nous devrions voir prochainement les mises à jour des textes officiels relatifs à la RE2020, conformément aux déclarations du gouvernement. Cette règlementation laissera aux constructeurs de larges libertés pour concevoir les bâtiments, mais en leur imposant des contraintes de production d’énergie renouvelable : celle-ci devra être supérieure aux consommations de l’intégralité des usages, sur une année. Ces nouveaux bâtiments seront donc à « énergie positive ».
La RE2020 constitue le prolongement de la RT2012, tout en conservant le même champ d’application ; elle attribue aux bâtiments un rôle passif, qui avec des équipements de production énergétiques, pourront être autonomes sur le plan énergétique.
La RE2020 obligera la profession notariale à s’interroger sur la gestion contractuelle de ces nouvelles obligations. Par exemple, les contrats relatifs aux bâtiments collectifs devront intégrer les nouveaux équipements « producteurs d’énergie » dont la règlementation de 2020 s’est enrichie. Le jour où les bâtiments tertiaires seront concernés, les contrats de vente portant sur des bâtiments « coques nues » devront prendre en compte à la fois l’efficacité énergétique des constructions initiales et celle résultant des aménagements postérieurs réalisés par les acquéreurs.
Grâce à la RE2020, la performance énergétique devient un élément affectant véritablement la valeur de l’immeuble.
Les investisseurs, particulièrement dans le secteur tertiaire, prennent en compte depuis plusieurs années les éléments de performance énergétique, à travers l’insertion dans le descriptif de l’immeuble à construire des éventuels labels (BBC, Label Effinergie +, Label Well, Breeam, etc) ou certifications (par exemple : HQE, H&E, Qualitel) à obtenir par les promoteurs ou constructeurs.
Alors que les certifications prennent pour référentiels les réglementations, les labels établissent leur propre cahier des charges pour déterminer le niveau de qualité qu’ils garantissent.
Les obligations législatives en termes de performance énergétique sont suppléées, depuis des années, par la pratique contractuelle.
Cet enthousiasme des investisseurs reste néanmoins confronté à l’usage : Les bienfaits en termes environnementaux garantis par les labels imposent des contraintes parfois surprenantes aux utilisateurs…
A titre d’exemple : l’exploitant d’un immeuble de bureaux peut se retrouver dans l’impossibilité de peindre ses cloisons dans le gris prévu à son code couleur en raison d’un albedo insuffisant qui aurait imposé une consommation de lumière supplémentaire !